La société civile immobilière, un instrument d’optimisation de la gestion et de la transmission du patrimoine immobilier locatif (partie 2)
Nous examinons à la suite de l’article consacré aux aspects juridiques la détention d’un immeuble à travers une SCI, les aspects fiscaux de ce mode de détention. Un accent particulier sera mis sur le régime d’imposition des revenus fonciers ainsi que sur la fiscalité liées au transfert de propriété de l’immeuble sous le couvert de la SCI.
La SCI: instrument d’optimisation fiscale de la gestion et de la transmission d’un patrimoine immobilier (2/2)
Avant la réforme fiscale du 27 décembre 2012 portant CGI, la SCI, en tant que société translucide, était soumise de plein droit à l’IR. Désormais l’option à l’IS lui est ouverte (Art. 4 III 1 CGI), ce qui a pour effet d’élargir le champ des possibles en matière d’optimisation fiscale. Il convient donc de comparer le régime d’imposition d’une SCI soumise à l’IR (A) et celui d’une SCI soumise à l’IS (B). Nous analyserons enfin l’impact du recours à la SCI en matière de droits de mutation à titre onéreux et à titre gratuit (C).
A. Les situations juridiques pouvant entraîner la dissolution de la socié
1. Principes généraux d’imposition des revenus provenant de la SCI
Le résultat est déterminé au niveau de la société, mais imposé entre les mains des associés qu’il soit distribué, mis en réserve ou reporté à nouveau: c’est le régime de la translucidité fiscale. Ce régime est souvent pénalisant lorsque les immeubles ont été acquis par crédit bancaire. Les associés risquant de payer l’IR sur des revenus qu’ils ne perçoivent pas parceque destinés en bonne partie au remboursement de l’emprunt.
2. Tenir compte de la qualité de l’associé au moment de déterminer le revenu imposable (Art. 64 CGI).
Lorsque les associés ne relèvent pas tous du même régime d’imposition relativement à leurs revenus, la détermination du résultat doit se faire conformément aux règles qui leur sont spécifiques :
- Parts sociales détenues par un particulier dans son patrimoine privé ou un professionnel soumis aux BNC = régime des revenus fonciers
- Parts sociales détenues par une entreprise soumise aux BIC ou à l’IS = régime des BIC….
3. Traitement des frais financiers (commissions et intérêts d’emprunts)
- L’associé peut déduire de ses bénéfices sociaux les frais financiers supportés à l’occasion de l’acquisition de ses parts sociales à crédit ou relatifs à son apport en compte courant ayant permis l’acquisition de l’immeuble (SCI/IR);
- L’associé peut déduire de ses bénéfices sociaux, sa quote part des intérêts financiers relatifs à un emprunt souscrit par la SCI pour la conservation, la construction, la réparation et l’entretien de l’immeuble appartenant à la société.
- Toutefois les intérêts versés aux associés au titre de leur apport en compte courant sont imposables au titre des revenus de capitaux mobiliers.
4. Détention d’un immeuble par une SCI et démembrement des parts sociales
- L’usufruitier est redevable de l’impôt sur les revenus fonciers (Art. 51 CGI)
- Sauf convention contraire conclue avec l’usufruitier, le nu-propriétaire est redevable de l’impôt au titre des plus-values de cession des immeubles dès lorsqu’il est considéré comme associé
- Les déficits de la SCI reviennent de droit au nu-propriétaire qui en tant qu’associé doit répondre des dettes sociales.
B. Régime d'imposition des revenus d'une SCI soumise à l'IS1
Passible de l’IS dans 2 cas:
- de plein droit en cas d’exploitation commerciale ou assimilée
- Sur option volontaire (Art. 4 III 1 CGI)
1. Détermination des revenus locatifs de la SCI/IS
- Détermination en application des règles concernant les BIC
2. Imposition des revenus locatifs
- Taux de 30%
Ce taux est plus intéressant que le taux marginal d’imposition qui peut atteindre 43% en matière d’IR, sans compter que la base imposable est moins importante en matière d’IS si l’on tient compte des amortissements et de la déductibilité de certaines charges (frais de notaire, frais d’agence engagés lors de l’acquisition de l’immeuble) qui ne sont pas admises en déduction dans le régime des revenus fonciers.
3. Gestion fiscale des revenus des associés
- A la différence de la SCI/IR dans laquelle les bénéfices simplement constatés sont imposés entre les mains des associés, dans la SCI/IS seuls les bénéfices distribués aux associés et les rémunérations des gérants associés sont imposées.
• La SCI peut mettre en réserve tout ou partie de ses bénéfices. De ce fait les associés pourront les récupérer sous forme de plus-values lors de la cession de leurs parts.
C. Transfert de la propriété de l'immeuble sous le couvert de la SCI
1. Avantages de la SCI en matière de droits d’enregistrement en cas de cession
Il suffit de comparer les droits d’enregistrement applicables à la cession de l’immeuble et ceux applicables à la cession des parts sociales de la SCI
- Pour l’immeuble, les droits d’enregistrement sont prélevés au taux de 5% de la valeur exprimée et des charges en capital
- Pour les parts de SCI les droits d’enregistrement sont aussi prélevés au taux de 5%, mais l’assiette n’est constituée que de l’actif net. Le passif y compris donc le crédit restant dû et ayant servi à l’acquisition de l’immeuble n’est pas pris en compte.
En revanche pour la vente d’un immeuble acquis sur la base d’un crédit partiellement remboursé, si le nouvel acquéreur entend prendre pour son compte le remboursement du reliquat, le solde restant dû sera considéré comme une charge augmentative qui vient donc s’ajouter à la valeur exprimée de l’immeuble. Sous ce rapport la cession sous le couvert d’une SCI est moins onéreuse pour l’acquéreur.
2. Avantages de la SCI en matière de droits d’enregistrement
- Déduction des dettes de l’assiette des droits d’enregistrement ;
- La valeur vénale de l’immeuble détenu en directe est toujours supérieure à la valeur de l’immeuble ramenée au nombre de parts sociales. Il est donc généralement toléré par l’administration fiscale (en tout cas en France) l’application d’une décote pour illiquidité des titres liée à une absence de marché, mais aussi en raison du caractère fermé de ce type de société.
Comme nous venons de le voir, la SCI comporte de nombreux avantages par rapport à la détention directe de l’immeuble. Elle permet notamment d’optimiser l’organisation, la protection, la gestion et la transmission du patrimoine immobilier locatif.
Cependant les acteurs de l’immobilier ne doivent pas perdre de vue que les chemins de l’optimisation sont souvent pavés de risques aux conséquences financières graves. Figurent en bonne place les risques fiscaux et juridiques. Bon nombre de montages faisant recours à la SCI, couplée aux techniques du démembrement de propriété ou aux libéralités (donations) sont souvent remis en cause par l’administration qui y voit un moyen d’éluder tout ou partie de l’impôt (réduction d’assiette fiscale, effacement de plus-values…) et n’hésite pas par voie de conséquence à mettre en branle la redoutable procédure de l’abus de droit pour fictivité de la SCI. Sur le plan juridique cette fictivité peut également servir de base à l’extension de procédures collectives d’apurement du passif d’une société commerciale vers une SCI en cas de confusion de patrimoines entre les deux personnes morales ayant des dirigeants communs.
Nous finirons en donnant quels que conseils :
- Eviter les montages ayant un but exclusivement fiscal ;
- Respecter le formalisme du Droit des sociétés en tenant les assemblées générales d’associés régulièrement,
- Eviter autant que faire se peut les garanties par une société au profit d’une autre ;
- Doter la SCI de suffisamment de ressources pour faire face à ses dépenses d’entretien et de réparation.
En tout état de cause, il serait mieux de s’attacher les services d’un spécialiste (notaire, expert-comptable, avocat-fiscaliste, gestionnaire de patrimoine…) pour bénéficier des nombreux avantages de la SCI tout réduisant les risques.
Par Ibrahima DIALLO
Ingénieur Patrimonial
Directeur Général CGP AFRIQUE
Master 2 Droit Notarial
Diplôme Universitaire de 3ème cycle en évaluation et transmission d’entreprise
Université Toulouse 1 Capitole
E-mail : ibrahima.diallo@cgpafrique.com
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